La vannerie : un patrimoine immatériel japonais

La vannerie est reconnue comme l’un des huit artisanats traditionnels Kogei Gijutsu du patrimoine immatériel japonais. Cette attention toute particulière du Japon envers l’artisanat délimite des arts protégés par un savoir-faire transmis de maître à élève et le plus souvent d’un parent à son enfant. Certains maîtres atteignant un très haut degré de maîtrise de leur art se voient décerner le titre de Trésor national vivant, de la même manière que certains objets présentés dans les musées. Leur point commun est leur capacité à transmettre à travers le temps que ce soit un patrimoine, une esthétique ou une part d’histoire et, dans le cas de l’artisan, un geste technique. 

La vannerie de bambou est l’un de ces artisanats protégés et son importance dans la société japonaise inspira aussi bien l’art graphique que l’art du métal. Notre boîte en est le témoin. 

Dans l’artisanat populaire japonais, le bambou est utilisé depuis toujours. Sa profusion dans l’archipel, sa souplesse et résistance exceptionnelles sans compter sa valeur en tant que symbole philosophique (car le bambou croît autour du vide) en font un matériau humble et beau, sans ostentation ni prétention convenant aussi bien à l’artisanat qu’à l’objet d’art japonais. 

Boîte en cuivre, laque et dorure. Japon, XIXe siècle.

Une esthétique de la simplicité

Il serait vain de penser qu’un Occidental apprécie l’art à la manière d’un Japonais. Le concept même définissant l’esthétique japonaise est en tout point éloigné du goût européen pour la représentation de la forme. Le goût japonais considère l’existence du rien et, en ce sens, lui attribue une place considérable comme révélateur de ce qui est. Cette esthétique connue sous le nom de Wabi Sabi contient en ces deux termes l’essence même d’un concept que la société moderne occidentalisée n’apprécie que modérément. 

Wabi désigne une simplicité, une solitude contemplative, une noblesse de l’essentiel ou encore la nature, l’imperfection et la dissymétrie. Sabi renvoie à l’écoulement du temps lent et inexorable, à la patine mais aussi à la poussière, aux légères brisures, aux objets et aux hommes abîmés, ridés, vieillis. L’association de ces deux termes éveille une idée de la beauté imparfaite, modeste et sans ostentation. Une beauté dont la première qualité est de n’être pas neuve et sans sagesse. Le Wabi Sabi honore le temps et son empreinte et se détourne de l’éclat (trop éblouissant et trompeur ?) de la nouveauté.

Boîte en cuivre, laque et dorure. Japon, XIXe siècle.

Notre boîte à vannerie de cuivre relève de cette esthétique discrète et silencieuse. Les entrelacements de cuivre – un métal humble, populaire et sans prétention – évoque le travail du bambou tandis que les coquillages sur le couvercle, à peine dorés, sont le souvenir des paniers de bambou des pêcheurs japonais. 

L’intérieur de cette boîte a perdu un peu de son laque et ce n’en est que plus appréciable. Le couvercle un peu inégal l’est peut-être depuis sa création même. Sans aucun doute si la forme avait été parfaite ou si l’artisan avait préféré le bronze ou davantage de dorure, l’objet aurait été insipide. Son esthétique Wabi Sabi en fait une ode poétique à l’une des plus délicates esthétiques japonaises.  

Boîte en cuivre, laque et dorure. Japon, XIXe siècle.

Marielle Brie de Lagerac
Historienne de l’art pour le marché de l’art et les médias culturels.
Auteure du blog Objets d’Art et d’Histoire